Sa Sainteté le Dalaï lamaFédération du Bouddhisme Tibétain

Brève présentation du contenu des enseignements

Sa Sainteté le Dalaï Lama a enseigné sur plusieurs textes de Nagarjuna :

Les "Stances de la Voie médiane"
(skt. Mulamadhyamaka-karika, tib. dbu ma rtsa ba'i shes rab),
Chapitre 26 (Examen des douze facteurs de la production interdépendante),
Chapitre 18 (Examen du soi et des phénomènes),
Chapitre 24 (Examen des quatre nobles vérités).

Le "Commentaire de l'Esprit d'Eveil"
(skt. Bodhichittavivarana, tib. Byang chub sems 'grel).

Le "Collier de joyaux"
(skt. Ratnavali),
Chapitre 3 (Enseignement succinct sur les causes de l'Eveil).

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Pour tenter de donner une présentation du contenu de ces enseignements, nous reproduisons ci-dessous les propos tirés d’une interview de Jigmé Khyentsé Rinpotché :

“Ces trois textes sont entièrement fondés sur les enseignements du Bouddha, dont le but principal est de venir en aide aux êtres. Pour appréhender les enseignements du Bouddha, il faut d’abord comprendre que les êtres sensibles souffrent, et que s’ils ne souffraient pas, ils n’auraient pas besoin qu’on les aide. Le Bouddha a donc enseigné afin que chaque être puisse se libérer de la souffrance. Et pour que les êtres soient libres de la souffrance, ils doivent se libérer de la cause de la souffrance. Quelle est la cause de la souffrance ? Nous savons bien que les êtres sont en proie à des émotions conflictuelles telles que la colère, l’irritation, l’attachement, diverses obsessions, etc., et tout cela est fondé sur l’ignorance. Pour dissiper l’ignorance qui est à l’origine de la souffrance, le Bouddha a donné nombre d’enseignements, et plus particulièrement ceux sur la sagesse, que l’on peut définir comme le contraire de l’ignorance, le fait de ne pas savoir.

Le Bouddha a donné une quantité énorme d’enseignements sur la sagesse, et dans les enseignements du Mahayana ou Grand véhicule, on trouve en particulier les enseignements sur la vacuité, sous diverses formes, tels que la Perfection de la Sagesse en 100 000 vers, celle en 20 000 vers, en 8 000 vers, et même une forme très condensée comme le Soutra du Coeur.

Mais tous ces enseignements sont très difficiles à étudier pour des personnes ordinaires comme nous. Même si on en a le souhait et le temps, il est pratiquement impossible d’appréhender tout cela en profondeur. C’est pour cette raison que Nagarjuna, ayant la sagesse d’un grand bodhisattva, a pu recevoir tous ces enseignements, les comprendre, et les exposer dans de nombreux traités dont l’un d’entre eux est le Madhyamika Mula Karika.

Et comme on peut le voir, le chapitre 26 de ce texte sur lequel Sa Sainteté va enseigner traite des douze facteurs interdépendants qui maintiennent les êtres dans le cycle des existences :
1) l’ignorance entraîne 2) les formations mentales qui engendrent 3) la conscience, laquelle crée 4) le nom et la forme, à l’origine des 5) six sens. Les six sens donnent lieu au 6) contact, et le contact à la 7) sensation. Celle-ci provoque 8) la soif ou le désir qui se transforme en 9) appropriation ou saisie. L’appropriation devient 10) pulsion vers l’existence, qui conduit à 11) la naissance, puis à la 12) vieillesse et la mort.

Une nouvelle fois, on peut constater que le premier de ces douze liens ou facteurs est l’ignorance, et pour la dissiper, Nagarjuna va de plus en plus loin dans l’explication de ce qu’est l’ignorance : ignorance de la saisie, de l’attachement, en commençant avec l’égoïsme, par exemple pourquoi nous nous considérons comme plus importants que les autres. Puis cette étude devient de plus en plus subtile, en détaillant l’attachement au soi, l’ignorance de base, celle d’où provient la saisie. C’est l’analyse du soi (la personne) et des phénomènes.

Nagarjuna expose également les quatre nobles vérités, qui commencent avec la souffrance. C’est cette vérité que le bouddha a enseigné en premier, car comme nous l’avons vu précédemment, la raison principale pour laquelle le Bouddha a enseigné est que les êtres souffrent. Pour se libérer de la souffrance, les êtres doivent en identifier les causes, c’est la vérité de l’origine de la souffrance. La pratique qui dissipe les causes de la souffrance, c’est la vérité du chemin, et le résultat de ce chemin, c’est bien sûr la cessation de la souffrance. Et pour emprunter véritablement cette voie, l’esprit d’Eveil est très important. On peut même affirmer que sans l’esprit d’Eveil, il est impossible de se trouver sur la voie et de pouvoir se libérer, soi-même et les autres, de la souffrance.

C’est pour cela qu'un texte comme le Tchangchoup Semdrel a été écrit. On définit l’esprit d’Eveil comme le souhait d’atteindre l’Eveil pour soi-même et les autres. L’esprit d’éveil se cultive et se développe en commençant par l’esprit d’Eveil en intention (principalement l’amour, la compassion, la joie et l’équanimité), puis en pratiquant l’esprit d’Eveil en action, comme les six perfections transcendantes (la générosité, la patience, la discipline, la diligence, la concentration et la sagesse). Tout cela revient en fait à cultiver un coeur bienveillant, apprendre à développer et tirer les bienfaits d’un bon coeur.

En ce qui concerne le "Collier de joyaux”, Sa Sainteté a enseigné sur le chapitre qui traite des causes de l’Eveil, et là encore, l’une des ces causes étant l’esprit d’Eveil.

A l’énoncé de ce programme, on peut se rendre compte qu’il n’y a rien de tout cela dont on ne puisse tirer profit. Et pour nous faciliter plus encore la tâche, comme ce que Nagarjuna enseigne est souvent très difficile à comprendre pleinement, Sa Sainteté le Dalaï Lama a présenté ces enseignements dans des mots et des concepts compréhensibles par chacun.

Ce fut donc une occasion idéale pour ceux qui sont à la recherche d’une voie spirituelle, ou engagés sur cette voie. Ce fut le produit d’un concours de circonstances particulièrement favorable : d'un côté, il y avait des personnes qui ressentaient de l’intérêt pour les enseignements du Bouddha, qui voulaient en savoir plus, et d'un autre côté, il y avait quelqu’un qui sait, qui a étudié tout cela pendant très longtemps, qui le maîtrise parfaitement, et qui était présent. Qui aurait pu rêver meilleure opportunité ?”

 

Initiation de Padmasambhava

Le mercredi 20 août au matin, Sa Sainteté a donné une initiation de Padmasambhava, tirée de la “Personnification quintessentielle des accomplissements intérieurs”, selon les enseignements secrets du cinquième Dalaï Lama.

Padmasambhava
D’un point de vue historique ou extérieur, Padmasambhava, originaire de l’ancien pays d’Oddiyana (actuelle vallée du Swat dans le nord du Pakistan), est le maître qui introduisit le bouddhisme au Tibet au huitième siècle. Répondant à l’invitation du roi Trisong Détsen, il se rendit au Tibet pour aider le maître indien Shantarakshita à édifier le monastère de Samyé. Puis, sous sa direction, l’intégralité des enseignements du bouddha disponibles en Inde fut alors traduite en tibétain, et il enseigna extensivement sur le véhicule de diamant, ou Vajrayana.

Padmasambhava

Du point de vue du Dharma, l’avènement de Padmasambhava fut prophétisée par le Bouddha Shakyamuni lui-même, et dont il est la manifestation. Il est également considéré comme la personnification de tous les bouddhas du passé, du présent et de l'avenir et il est vénéré dans la tradition tibétaine comme le second Bouddha. Son activité pour le bien des êtres est inconcevable. Il établit fermement au Tibet, et pour des siècles, les trois véhicules enseignés par le Bouddha, et tout particulièrement le Vajrayana, ou Véhicule de Diamant.

C’est également à lui que l’on doit les différents trésors spirituels appelés termas.
Pour tenter d’expliquer cette tradition des termas, on peut dire en termes très généraux que Padmasambhava (plus communément appelé en tibétain Gourou Rinpotché, le Précieux Maître), alors qu'il implantait la doctrine du Bouddha au Tibet, perçut que nombre de ses enseignements s'avéreraient mieux adaptés et plus accessibles dans le futur, quand les besoins, les capacités et le mode de vie des gens auraient changé. En tant que maître doué d'une puissance illimitée, il scella ces enseignements au sein des éléments (rochers, lacs, etc.) et dans les couches les plus profondes de l'esprit de ses plus proches disciples. Ceux-ci avaient eux-mêmes atteint de hauts accomplissements spirituels et purent en conséquence, dans leurs incarnations suivantes, révéler les trésors et les transmettre à leurs contemporains. C'est ainsi que dans les siècles qui suivirent, et jusqu’à nos jours, un flot ininterrompu de trésors fut mis à jour. Cette profusion d'enseignements fournit la base de toutes les pratiques de méditation de la tradition dite des “anciens” (tib. Nyingma).

Au dix-septième siècle, le cinquième Dalaï Lama, Gyalwa Ngawang Losang Gyatso (1617-1682), souvent désigné sous le nom de “Grand Cinquième” en raison de son rayonnement spirituel, politique et culturel très important dans l’histoire du Tibet, fut l’un de ces maîtres appelés à révéler en temps opportun les enseignements cachés par Padmasambhava. Prophétisé dans certains termas comme la manifestation de l’activité éveillée du roi Trisong Détsen, il eut depuis son très jeune âge de nombreuses visions, dont celles de Padmasambhava, au cours desquelles il reçut transmissions et enseignements, comme ceux de la “Personnification quintessentielle des accomplissements intérieurs”, que va donner Sa Sainteté le Dalaï Lama à Nantes.

 

L’initiation

Le terme “initiation” est la traduction du mot tibétain wang. Cette traduction n'est peut-être pas tout à fait adéquate, mais elle est communément utilisée, et a l'avantage d'indiquer que c'est la première étape, indispensable pour commencer la pratique des tantras. Le mot wang veut littéralement dire “pouvoir “, mais dans ce contexte particulier signifie plutôt “transmission de pouvoir”. Cela se réfère à la transmission du pouvoir de la sagesse de maître à disciple, autorisant ce dernier à s'engager dans la pratique, et à en retirer les fruits.

Pour donner une explication de ce qu’est une “transmission de pouvoir”, on peut citer brièvement Sa Sainteté le Dalaï Lama :

“Pour commencer, notre nature fondamentale, ce qu’on appelle “la nature de bouddha”, ou tathagatagarbha, la véritable nature de notre esprit, est présente en nous de manière naturelle et inhérente. Cet esprit qui est le nôtre, fonctionne depuis un temps sans commencement; il va de même pour la nature plus subtile de cet esprit. Sur la base de la continuité de cette nature subtile, se fonde la possibilité d’atteindre l’Eveil. Ce potentiel est ce que l’on appelle la graine de l’Eveil, la nature de bouddha, la nature fondamentale, ou en sanskrit le tathagatagarbha. Nous avons tous cette nature de bouddha, chacun d’entre nous. Lorsque l’on rend hommage à une représentation du Bouddha, on le fait pour honorer une personne qui a atteint l’état de bouddha. Le Bouddha a atteint l’Eveil parce que sa nature était celle d’un bouddha. Nous avons cette même nature, et, de la même manière que le Bouddha a atteint l’Eveil par le passé, nous-mêmes pourrons devenir des bouddhas à l’avenir.

Lorsqu’un jour, nous atteindrons l’Eveil, le continuum subtil de notre conscience s’éveillera à un état d’omniscience appelé en sanscrit dharmakaya. La nature de l’esprit à ce stade est appelée svabhavikakaya. Le fait que l’esprit soit totalement pur par nature est l’un des aspects du svabhavikakaya : la totale et naturelle pureté. Le fait que les obscurcissements adventices aient été totalement dissipés et qu’ils n’occultent plus la véritable nature de l’esprit est également un autre aspect du svabhavikakaya : la purification des obscurcissements adventices.

Il est certain qu’en nous tous demeure ce potentiel qui nous permet de nous éveiller à l’état de bouddha et d’atteindre à l’omniscience. Le processus de l’initiation, ou wang, extrait en quelque sorte ce potentiel, et lui permet de se manifester plus pleinement. Quand vous recevez une initiation, c’est la nature de votre esprit, la nature de Bouddha, qui permet que cette initiation vous fasse mûrir. Grâce à la transmission de pouvoir, vous êtes initié à l’essence des bouddhas des cinq familles...”

(Extrait d’un enseignement donné à Vincennes le 7 octobre 1982 lors de la transmission du Sangwa Gyachen, trésor révélé par le cinquième Dalaï Lama.)

En cet âge décadent, recevoir une initiation de Padmasambhava est une grande bénédiction qui contribue, au plan personnel, à apaiser les frustrations, les souffrances, les maladies etc., et au plan collectif, contribue à pacifier les guerres, les épidémies, les famines et autres souffrances qui frappent notre monde. En faire la pratique, et plus simplement réciter son mantra est considéré comme un moyen très puissant de dissiper les obstacles, et de progresser rapidement sur la voie de l’Eveil.

Cette initiation était ouverte à tous, et elle pouvait simplement reçue comme une bénédiction.

Pour ceux qui l'ont reçue et qui souhaiteraient avoir le texte de la pratique, il est possible de se le procurer en contactant les Editions Padmakara.